L’histoire du domaine de Fromente et de la Tour des  Templiers

L’histoire de Fromente, connue avec certitude, remonte seulement au début du 14ème siècle. Nous savons que ce site est beaucoup plus ancien, mais nous ne pouvons évoquer pour ces périodes  que des hypothèses ou des légendes  ….

Evoquons celles-ci  rapidement :

  • Tout d’abord d’où vient ce nom de Fromente ?  Nous trouvons 2 hypothèses, l’une évoquant une terre à blé, et le meilleur des blés, le froment. Le domaine de Fromente comprenait sur la hauteur de la colline le château et son parc d’agrément, et, plus bas,  la partie agricole, le Castella,  où ce froment a parfaitement pu être cultivé.  Mais une autre thèse, celle que Michel Garnier considère comme la plus probable, remonte à l’époque gallo-romaine. En effet le réseau hydraulique souterrain évoque davantage l’époque romaine que le Moyen-Age. Et le nom de Fromente viendrait de 2 mots latins, forma et formamentum, qui ont un rapport direct avec les ouvrages romains relatifs au captage et à l’écoulement des eaux.

 

  • Au début du 10ème siècle, les prérogatives féodales de notre Mont d’Or passèrent aux mains des Chanoines Comtes de Lyon qui firent construire de nombreux châteaux forts pour défendre leurs droits féodaux, pour tenir leurs vassaux et aussi pour protéger leurs sujets. On peut donc penser que l’origine du château de Fromente date de cette époque, vers la fin du 1er millénaire.  Ensuite, comme ce fut souvent le cas, une église d’architecture romane fut construite au 11ème ou 12ème siècle, à proximité du château, puis des habitations vinrent se blottir autour le l’église, sous la protection du château fort, ce qui constitua ce que nous appelons maintenant le « Vieux Bourg » de Saint Didier.

 

  • Selon une légende, Fromente aurait abrité ensuite une commanderie, nom donné aux monastères tenus par les Templiers. L’Ordre du Temple, à la fois religieux et militaire, fut créé en 1129, et supprimé en 1312 par le pape Clément V sur décision imposée par le Roi de France Philippe Le Bel  qui voulait s’emparer de tous les biens du Temple; Les Templiers furent arrêtés, emprisonnés, torturés. Le Grand Maître de l’Ordre du Temple, Jacques de Molay, et tout son état major moururent sur le bûcher en 1314. Mais les simples Chevaliers échappèrent souvent à cette répression. Une légende raconte que 2 de ces Chevaliers se seraient réfugiés et cachés dans une Tour qui aurait depuis gardé ce nom de Tour des Templiers.  Quel rôle joue donc cette Tour ?  Cette Tour est à la fois un puits et une Tour fortifiée,  avec 2 tours concentriques.

    A cette époque très instable,  notre région   était le théâtre d’invasions sanglantes de bandes armées  qui  se débarrassaient des morts en les jetant dans les puits. C’est donc pour assurer la potabilité de l’eau que furent construites les tours à eau au dessus desquelles on dressait une margelle et le treuil nécessaire pour puiser l’eau en profondeur, dans une nappe alimentée par des sources. En général  l’accès au treuil se faisait à l’aide d’une échelle. Mais la tour à eau de Fromente est une exception : nul besoin d’échelle pour monter sur la tour, un escalier entre les 2 tours, la tour à eau intérieure et la tour fortifiée extérieure, a fait l’affaire. Et le puits descendait à plus de 10 m de profondeur pour capter les eaux des sources du vallon de Fromente.

 

  • Mais revenons à la légende de nos 2  Templiers qui échappèrent à la milice de Philippe le Bel et disparurent. Selon Michel Garnier, fin connaisseur des réseaux hydrauliques souterrains,  on peut imaginer que nos 2 Chevaliers descendirent dans la cave du bâtiment central, là où se trouvait une grande citerne de 15 m de long, destinée à recueillir les eaux des sources. Le trop plein de ce réservoir se déversait  dans un souterrain qui passait au pied du puits de la tour à eau, puits que l’on pouvait emprunter ensuite pour remonter si quelqu’un manœuvrait le treuil ; Mais, à défaut, il suffisait de continuer à cheminer dans la galerie jusqu’à un escalier à vis qui permettait de remonter à l’air libre.

    Voici donc élucidé pour la légende le trajet de fuite de nos 2 Templiers.  Se sont-ils ensuite cachés dans la Tour ?  Nul ne sait, mais cette Tour avait un nom : elle devint et reste encore à ce jour, 7 siècles après, la Tour des Templiers. Elle a subit des aménagements au cours des siècles ; elle a été surmontée d’un pigeonnier et d’une superbe charpente en bois qui porte un toit caractéristique, en tuiles anciennes.

L’histoire de Fromente durant les siècles qui suivirent :

  • A la fin du 14ème siècle, le Chapitre des Chanoines Comtes de Lyon, toujours suzerains de St Didier, firent renforcer les défenses du château de Fromente et de l’église toute proche.

 

  • Au début de la Renaissance, au 15ème siècle, la famille de Sève, d’origine piémontaise, prend possession de Fromente et s’y maintiendra pendant plusieurs générations. De cette époque datent les embellissements de style « Renaissance » : façade à meneaux à l’est, galerie à arcades et colonnes dans la cour centrale….

 

  • Du 17ème siècle à la révolution : la famille d’André succède aux de Sève. Hugues d’André est seigneur de Fromente en 1641. Une fille d’André épouse en 1737 Pierre François Gagnières, Comte de Souvigny, originaire de Sologne, qui devient de ce fait Seigneur de Fromente. En 1789, Jacques Claude Gabriel de Souvigny est Seigneur de Fromente. Il mourra sur l’échafaud pendant la révolution.

 

  • De la révolution à nos jours : pendant la révolution Fromente devient un « bien national » qui est d’abord vendu à Fleury Lacoste, qui le cède ensuite à Joseph Augustin Lamarque.  En 1803, ce dernier cède le domaine à Claude Roussel qui le revend en 1804 à Joseph Sereziat. En 1810, le domaine est à nouveau vendu en totalité (Fromente et Castella qui en dépend) à Jacques Hugues André Viallet.  En 1834, un nouveau propriétaire prend possession du domaine, Pierre Pignatel, un banquier,  resté célèbre par la beauté de ses équipages de chevaux arrivés d’Angleterre avec leurs cochers.

 

  • Le 26 juillet 1863 eût lieu la consécration de la nouvelle église, Notre Dame de Saint Didier. Le Cardinal De Bonald, Archevêque de Lyon, passa la nuit précédent cet évènement au château de Fromente, chez Monsieur Pignatel, d’où il arriva en procession jusqu’à la nouvelle église.

 

  • Vers 1880, un incendie ravagea la partie sud du château. Celle-ci fut reconstruite (façade sur le parc, pignon pyramidal, balustrade….)
  • En 1906, Monsieur Roche de Rigodière arrive en tant que maître de Fromente. La famille de Rigodière demeura propriétaire de ce domaine jusqu’en 1944. En 1943, après sa retentissante évasion d’Allemagne, le Général Giraud   séjourna à Fromente. C’est en 1944 que ce beau domaine  fut vendu par la famille Roche de Rigodière aux Dames de Chevreul qui en firent une école.
  • En septembre 1954, Fromente connut encore un grand jour avec « Le Grand Festival du Cheval » organisé à l’initiative de Monsieur Emmanuel Bechetoille au profit des œuvres de bienfaisance, et honoré par la présence du Président Edouard Herriot.
  • De nos jours, Fromente, amputé de part et d’autre pour des constructions d’habitations, villas et immeubles, en particulier au sud-est d’une grande partie du Castella devenu le lotissement « Le Castellard », continue à former la jeunesse de notre Mont d’Or.

Ce site de Fromente est « inscrit » en tant que monument historique, mais il ne bénéficie pas du statut  de monument historique « classé » qui aurait constitué un plus haut niveau de protection. Ce statut n’a pas été accordé au site dans son ensemble du fait du manque d’homogénéité des constructions, avec une partie médiévale, une partie « renaissance » et une dernière partie reconstruite au 19ème siècle. Toutefois, le statut de monument historique « inscrit » constitue tout de même un certain niveau de protection de l’édifice, extérieur, intérieur et abords.

 

Bibliographie :

  • « Histoire de ST DIDIER AU MONT D’OR » de Maurice Hermann, édition de 1985
  • « Le TOPONYME Mont d’Or et SON MASSIF LE MONT D’OR LYONNAIS » de Michel Garnier, édition d’avril 2012
  • Publications de LA VIE EN COULEURS en 1996 et 1997 dans la série « LES DESIDERIADES »

Rédaction : Jean-Claude Moreau en août 2013